Qui sont les dirigeants de droit d’une association ?

Les dirigeants de droit sont le plus souvent les membres du conseil d’administration, élus par l’assemblée générale. Ils sont chargés de la gestion de l’association cela dans le respect des grandes orientations stratégiques fixées par l’assemblée générale.

Les membres du conseil d’administration interviennent sur mandat donné par l’association et rendent ainsi des comptes de leur gestion et de l’emploi des ressources devant l’assemblée générale.

Ce conseil d’administration comprend en général un bureau composé d’un Président, d’un Secrétaire et d’un Trésorier.

Le Président, comme le Secrétaire et le Trésorier, est chargé de l’exécution des décisions prises par le conseil. Il a également un rôle de représentation de l’association vis à vis des tiers dans tous les actes de la vie civile.

Quelle est la définition du dirigeant de fait et quels sont les indices qui peuvent conduire à ce que cette qualification soit retenue ?

Le dirigeant de fait peut être défini comme “celui qui en toute indépendance et liberté exerce une activité positive de gestion et de direction et se comporte, sans partage, comme “maître de l’affaire“” (Cass., Com., 10 octobre 1995, n°93-15553). Il agit ainsi comme un dirigeant de droit sans en avoir la qualité. 

Cette qualification sera le plus souvent reconnue à l’encontre d’un dirigeant salarié. Si le recours à un dirigeant salarié et plus largement à une main d’oeuvre salariée est totalement légal, cela afin d’assurer le fonctionnement au quotidien de l’association, le conseil d’administration doit notamment réaliser un contrôle effectif sur cette gestion. A défaut, le dirigeant salarié sera susceptible d’être qualifié de dirigeant de fait.

Dans la pratique, une direction de fait sera mise le plus souvent en lumière dans le cadre d’un contrôle fiscal ou URSSAF.

Par manque de compétence ou de connaissance de leurs responsabilités, de disponibilité aussi s’agissant de bénévoles, ou en raison d’une confiance excessive vis à vis des dirigeants salariés, les membres d’un conseil d’administration auront laissé en réalité l’entière gestion aux dirigeants salariés, en assurant un contrôle faible voir inexistant.

Bien entendu, dans les situations extrêmes, il pourra s’agir d’un directeur salarié qui outre-passe ses prérogatives et prend le pouvoir en ne respectant pas les décisions du conseil d’administration, et en bloquant l’information notamment. 

On précisera que la direction de fait peut parfaitement émaner d’un tiers à l’association, ou d’un salarié non membre de la direction, mais cela est beaucoup moins fréquent.

Dans les faits, la qualification de dirigeant de fait découlera de faisceaux d’indices   :

– des statuts qui ne définissent pas la réparation des rôles entre le conseil d’administration et les dirigeants salariés,

– un conseil d’administration dormant ou quasi dormant : absence quasi-permanente d’une majorité des membres du conseil d’administration aux réunions, absence de réunion du bureau, absence de procès verbaux des réunions du conseil d’administration,

– des dirigeants salariés signant l’ensemble des contrats engageant l’association (commerciaux, administratifs etc…), ayant signature générale et illimitée dans le temps sur les comptes, ne réalisant pas de compte rendu de leur gestion auprès du conseil d’administration, et intervenant systématiquement comme représentant de l’association vis à vis des tiers,

– des délégations de pouvoir qui ne sont pas autorisées par les statuts, ou  qui sont générales et illimitées dans le temps  sans aucun contrôle exercé par le conseil d’administration,

– une rémunération excessive des dirigeants salariés, sans rapport avec les fonctions techniques exercées,

– une participation du dirigeant salarié aux délibérations du conseil d’administration,

etc…

Si l’administration, qui doit apporter le preuve de l’existence d’une direction de fait,  admet plus particulièrement pour les grosses associations que les dirigeants salariés puissent bénéficier de délégations de pouvoirs et de signatures mais à condition que cette gestion s’inscrive dans les grandes orientations définies par la gouvernance et qu’il rende compte régulièrement de sa mission de sorte que la gouvernance peut justifier d’un contrôle effectif  (BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20-20120912, n°420).

Ainsi a été considéré comme dirigeant de fait, un directeur qui avait placé le conseil d’administration dans un état de dépendance : le conseil d’administration ne recevait qu’un minimum d’informations et entérinait purement et simplement les décisions du directeur (Cass. Soc. 6 février 2001, n°98-15129 ; 18 juin 1985 n°84-12021).

Quelles sont les conséquences ?

1. Le dirigeant de fait pourra être poursuivi au même titre que les dirigeants de droit, en conséquence de son mandat de fait, tant sur le plan civil, financier que pénal. 

Il engage sa responsabilité civile en cas de faute dans sa gestion vis à vis de l’association. A l’égard des tiers ou de membres de l’association, la responsabilité de l’association pourra être engagée sauf faute détachable. 

S’agissant de sa responsabilité financière, Il pourra être déclaré solidairement responsable des dettes de l’association en cas :

– de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire de l’association,

– délivrance abusive de reçus fiscaux,

– manoeuvres frauduleuses et inobservations répétées des obligations fiscales.

Au niveau pénal, il pourra être poursuivi au titre des infractions intentionnelles ou non commises dans le cadre de sa gestion (manquement à la règlementation relative à la sécurité etc…) sans possibilité de se prévaloir d’une délégation de pouvoir, et engagé également la responsabilité de l’association.

2. Vis à vis des salariés, les décisions prises par le dirigeant de fait sont sans effet juridique à l’égard du personnel.

3. L’association ne peut prétendre à une exonération des impôts commerciaux que si sa gestion est strictement bénévole et désintéressée (article 261, 7-1°-d du Code général des impôts).

Or, lorsque l’administration fiscale requalifie le dirigeant salarié en dirigeant de fait, elle constate que ce dirigeant perçoit une rémunération, ce qui a pour conséquence immédiate de faire perdre à l’association son statut fiscal privilégié (remise en cause du recours au mécénat, imposition à la TVA, assujettissement aux impôts commerciaux). 

Comment sécuriser l’association ? 

Il convient de s’assurer que les dirigeants salariés :

– rendent compte régulièrement par écrit de leur gestion auprès de la gouvernance, conformément à la mission décrite dans leur contrat de travail, la fiche poste, le règlement intérieur, plus largement tout document écrit précisant et encadrant la mission, 

– agissent dans le cadre de délégations de pouvoir écrites, précises et relatives à l’organisation et la représentation de l’association exclusivement,

– assistent aux réunions de la gouvernance avec voix consultative seulement, sans droit de vote,

– reçoive le cas échéant délégations de signature sur les comptes bancaires, de préférence non générales et renouvelées, régulièrement visées dans les procès-verbaux. 

La gouvernance doit impérativement :

– fonctionner de manière régulière, et ainsi se réunir et délibérer, de même que l’assemblée générale, 

– dresser des procès-verbaux des réunions décrivant précisément les directives données aux dirigeants salariés, et mentionnant clairement les éventuelles désaccords, 

– s’assurer que les statuts, ou tout autre document interne définissent clairement la répartition des pouvoirs entre la gouvernance et l’exécutif, et de la mise en de modalités de suivi et d’évaluation de ces règles. L’ensemble des documents internes, supports de communication et autres devront respecter la réparation mise en place afin d’assurer la cohérence quotidienne et éviter tout risque tant interne qu’en cas de contrôle (des statuts à la fiche poste, en passant par le règlement intérieur).

En définitive, tout risque sera écarté si l’association met en place une organisation claire et transparente.